Aujourd’hui, j’ai choisi de consacrer la lettre H à ma ville de naissance, Harfleur. Cette commune est située en Seine-Maritime. Limitrophe à la ville du Havre, elle est située sur la rive droite de la Seine et elle est traversée par l’un de ses affluents, la Lézarde, qui traverse également Montivilliers en amont.
Harfleur est citée au IVe siècle, sous le nom de Caracotinum, dans l’Itinéraire d’Antonin. Il s’agit d’un guide de voyage de la Rome antique, sans représentation graphique, qui recense les villes d’une grande partie de l’Empire romain et les distances les séparant. Il y a vingt manuscrits datés du VIIe au XVe siècle qui recensent 372 voies sur 85 000 kilomètres. L’Itinéraire d’Antonin montre l’existence de plusieurs villes aujourd’hui disparues. Les fouilles indiquent une faible occupation à Harfleur à l’époque gauloise. En revanche, à l’époque gallo-romaine, Harfleur est déjà une petite agglomération traversée par plusieurs voies romaines. La présence d’un sanctuaire dominant la Seine, de fours et d’une nécropole est également attestée.
On retrouve ensuite Harfleur au XIe siècle sous les noms Harofloz en 1006, Harofloth en 1025 et Herolfluoth en 1035. L’appellatif -fleur tire son origine de la toponymie anglo-scandinave ou norroise en lien avec le vocabulaire du littoral. Pour les uns, le terme -fleur vient du vieux norrois flóð « flux, marée, flot » et flói « rivière se jetant dans la mer ». Pour les autres, le terme vient du vieil anglais flōd « flux, marée, flot ». L’appellatif -har serait issu d’un nom de personne, traditionnellement associé à l’élément -fleur.
Au Moyen-Âge, les fouilles démontrent l’existence de sarcophages mérovingiens. En 1202, Jean Sans Terre, impopulaire en Normandie, octroie à Harfleur une charte de commune, ce qui l’exonère d’impôt. En 1281, le port s’étend et la ville devient la propriété du Roi de France. En 1337, c’est le début de la Guerre de Cent Ans. Deux ans plus tard, Philippe de Valois part d’Harfleur avec son armée, dont 20000 hommes de Normandie, pour attaquer l’Angleterre et la Flandre. Après avoir brûlé Hasting et Southampton sa flotte est piégée et détruite en 1340. Au même moment à Harfleur, le commerce se développe avec le Portugal et l’Espagne. En 1341, le roi exonère les commerçants portugais et espagnols d’impôts et leur octroie des entrepôts et des quais. La construction de fortifications commence en 1344, pour se terminer 17 ans plus tard. En 1369, Edouard III tente de prendre la ville à deux reprises, en vain. Shakespeare évoque le siège d’Harfleur par les anglais en 1415, après un mois de résistance. En 1435, Harfleur est libérée avant d’être reprise par les Anglais en 1440. La ville est définitivement libérée en 1450 et rattachée à la France.
Durant 600 ans (IXe au XVIe siècle) Harfleur était le premier port normand. L’estuaire était encadré par Harfleur au nord et Honfleur au sud. Mais la Seine s’envase au fur et à mesure et l’activité du Port est condamnée.
En 1593, Pierre Coste, un bourgeois anobli, achète au roi des terres situées près des anciens remparts et fossés. Il y fait ériger un château terminé en 1653. Le château devient la propriété de la famille La Bedoyère au XIXe siècle qui le restaure en 1851 et 1873. En 1910, le château est racheté par Charles Schneider. En 1953, la ville le rachète aux industries Schneider et devient l’Hôtel-de-Ville.
De la Révolution à 1900, la ville se modernise et s’industrialise, avec la construction de nombreuses infrastructures et le développement de services.
Harfleur est citée dans le poème de Victor Hugo en hommage à sa fille, l’un de mes préférés (1856) :
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
A demain.