Jacques François BOUCHEL D’ORCEVAL est le sosa 970 de mon compagnon (10e génération). Quand j’ai découvert ce personnage très particulier, j’ai passé des heures à enquêter à son sujet… malgré les sources manquantes, j’ai une idée de ce qu’a pu être sa vie.
Jacques est né vers 1699 à Soissons, il est le fils de François Jean Baptiste DE BOUCHEL seigneur d’ORCEVAL décédé à Villers-Cotterêts le 10 octobre 1730 à l’âge de 64 ans et d’Elisabeth MORANT décédée le 6 août 1747 à Villers-Cotterêts à l’âge de 70 ans. Son père François Jean Baptiste était Mousquetaire de la première Compagnie, il obtint une Commission d’une Compagnie de Dragons; mais il n’en fit rien, s’étant marié jeune. Il était également écuyer, Conseiller du Roi, Avocat au Parlement et Lieutenant aux Eaux et Forêts du Duché de Valois.
Le « Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l’histoire & la chronologie des familles nobles de la France, l’explication de leurs armes et l’état des grandes terres du royaume ; DE LA CHENAYE-DESBOIS et BADIER. 3. éd. (Vol. 03) » nous donne les renseignements suivants :
Jacques a trois frères et une sœur :
– Jean Baptiste (1706-) : qui fut Lieutenant au Régiment de Gesvres. Jean-Baptiste a laissé de N… du Mouret un fils unique, Bernard DE BOUCHEL-D’ORCEVAL, Mousquetaire dans la première Compagnie.
– Marie Elizabeth (-) : veuve du Sieur BONNIN, Ecuyer, Seigneur DE MESSIGNAC, pas d’enfants.
– Joseph Alexandre (-) : dit le Chevalier D’ORCEVAL, « Lieutenant de Cavalerie dans le Régiment de Gesvres, puis Chanoine de l’Eglise Cathédrale de Noyon (vers 1771), Prieur-Commendataire du Prieuré de Dolmairas et de Notre-Dame de Sourdignac, ci-devant de ceux de Bernay & de Dampierre ».
– Jacques Charles (-1734) : Lieutenant de Cavalerie au Régiment de Gesvres, blessé au fort de Kell en 1733 et décédé des suites de ses blessures en 1734 à Wissembourg.

Armes de la famille BOUCHEL D’ORCEVAL « D’azur, semé de trèfles d’argent au lion passant aussi d’argent brochant sur le tout. »
La famille BOUCHEL D’ORCEVAL tire son origine d’un Antoine DE BOUCHEL, Ecuyer, qui vivait en 1442, en Picardie, près de Roye. Elle a été attachée à la Maison DE BOURBON-CONDE, Sire de ROYE. Cette famille a formé deux branches :
1. L’une dans le Brabant (Province de Bruxelles, Belgique) à la fin du 16e siècle, qui subsiste encore dans le Baron DE BOUCHEL, seigneur DE BIENNE, DE BANDEMONT, ayant vécu à Bruxelles et ayant eu une fille (1771).
2. L’autre dans le Valois (région naturelle correspondant au quart sud-est de l’Oise avec une partie adjacente de l’Aisne), vers 1600. Depuis son établissement, un Julien DE BOUCHEL, Ecuyer, a eu pour fils :
Etienne DE BOUCHEL, qui eut :
Gilles DE BOUCHEL, Lieutenant d’une Compagnie de 100 hommes d’armes, sous le Roi Henri IV, qui eut :
François DE BOUCHEL, son fils, le premier qui eut la Seigneurie D’ORCEVAL, fut Capitaine de Cavalerie dans le Régiment de Lénoncourt. Il servit longtemps en Italie, où il fut fait Gouverneur du Port Hanséatique dans la Romagne.
Il eut pour fils François Jean-Baptiste DE BOUCHEL-D’ORCEVAL (cité plus haut) qui eut donc 5 enfants.
Revenons en au fils aîné de François Jean-Baptiste, le fameux Jacques. Si son histoire a retenu mon attention c’est qu’il est parti pour le Québec, province que j’affectionne beaucoup pour y avoir vécu ! La première mention de sa présence au Canada est faite en 1730. A son arrivée, il est un « fils de famille », déchu de son droit d’exercer sa profession d’avocat, puis il devient officier d’infanterie dans les troupes de la Marine.
Un étonnant document issu des « Délibérations et mémoires de la société royale du Canada » et rédigé par Jacques nous raconte son histoire et les raisons de son arrivée au Canada…
– « M.AMIOT reçu avocat en parlement en 1728 où je prêtais serment entre les mains de Monsieur du PORTAIL, premier président, et ce dans le mois de juillet de la même année, comme j’eus le malheur de perdre mon cher père, le 10 octobre 1730, je comptais posséder la charge, mais ma mère et mes frères la firent vendre me promettant alors que M. LE DUC DE GUISE me donnerait une Lieutenance d’Infanterie, loin de me la donner, on me fit arrêt comme j’étais à Château-Thierry, et conduire dans la citadelle de la Guise où je me comportais en gentilhomme. M. DE SAINTE-SUZANNE qui en est Lieutenant du Roy et Commandant ne me refusera pas cette justice, je tins même un enfant avec son épouse lors de ma détention. Au bout de huis mois et demi on vint me rechercher me faisant entendre que j’allais aux Iles, on me mena sans gêne jusqu’à Paris, je vis même ma mère et ma tante DE BRULARD en passant, et ma mère me fit l’honneur de me dire qu’elle n’avait aucune part en ce qui m’arrivât. Enfin je fus mené au Petit Châtelet, où il me fut défendu de parler à personne d’où je fus transféré à La Rochelle, à la suite d’une chaîne et mené au Canada. Je n’ai jamais rien fait contre l’honneur. J’étais lors de mon arrêt âgé de 32 ans, j’étais par conséquent mon maître, je ne me suis jamais mêlé d’affaires d’Etat, ni de la religion, mon seul crime a été un trop grand amour des plaisirs suivis de quelques dépenses, pour cela a-t-on pu obtenir une lettre de cachet contre moi étant l’aîné de ma famille, âgé de 32 ans, et ayant perdu mon père, et étant avocat au Parlement de Paris, Profession noble qui ne déroge point. Ma misère m’a contraint à me marier ici. Comme marque de la dureté de mes parents, ma mère qui a 40 000 francs de bien, ne m’a point envoyé un sou quoi qu’elle marque le contraire, ce n’est que mon frère qui m’a envoyé depuis 4 ans 500 livres, ma mère même me retient mes habits, mes hardes, mon linge et mes effets. J’ose vous demander justice, j’ai une femme sur les bras, où mon rappel et ma contre-lettre ou 500 livres de pension et mes effets. J’ose tout espérer et l’infortuné D’ORCEVAL ne cessera d’adresser ses vœux au ciel pour votre santé et prospérité. »
Il ne fut pas fait droit à la supplique du malheureux D’ORCEVAL.
« Nous veillerons à ce qu’il ne repasse point en France et nous empêcherons pareillement sa femme d’y passer » écrivaient de Québec, le 5 octobre 1736, Messieurs de BEAUHARNOIS et HOCQUART.
D’ORCEVAL privé de revoir sa patrie, et empêché par la loi d’exercer sa profession d’avocat, se fit praticien et on trouve dans les archives de Québec plusieurs pièces des procédures qu’il rédigea. Ces pièces prouvent qu’il avait du talent et qu’il était digne d’un meilleur sort. –
Sa femme est Françoise CARDINET (ou CHEVALIER), née le 30 décembre 1710 à Québec. Le Fichier Origine nous dit que son père est Jean-Baptiste CARDINET né en 1675 à Cléry-Saint-André dans le Loiret et décédé le 1er mai 1737 à Québec, il était perruquier et chirurgien… Sa mère est Marie-Madeleine STILSON né Mary, une protestante anglaise originaire de Nouvelle-Angleterre convertie au catholicisme et baptisée à l’âge de 14 ans en 1695. Elle signe un contrat de mariage avec Jean-Baptiste le 18 octobre 1702 et se marie le 31 octobre à Québec. Il est fait mention de leur présence rue Sous-le-Fort, l’une des plus anciennes rues de Québec, une rue de marchands, marqué par la présence de nombreux émigrés anglais venus de Nouvelle-Angleterre.
Jacques et Françoise ont 5 enfants :
– Elisabeth-Françoise née le 23 juillet 1735
– Louise-Victoire née le 9 juin 1736
– Agnès née le 27 mai 1737 : l’ancêtre directe de mon compagnon (sosa n°485), mariée à François-Antoine JARRY DE MANCY, Ecuyer, Maître de Camp de Cavalerie, & Maréchal des Logis de la Seconde Compagnie des Mousquetaires, Chevalier de Saint-Louis. « Elle a obtenu, après la vérification des preuves de noblesse de cinq quartiers, donnés par M. D’HOZIER, Généalogiste et Juge d’armes de France, le don de 10 000 livres, laissé par M. COCHET DE SAINT- VALLIER pour une Demoiselle Noble d’Extraction, lequel don a été distribué après le certificat donné par M. le premier Président de Paris, & par Messieurs le Procureur-Général & Avocat-Général. »
– Roch-Charles né le 27 août 1740 : Lieutenant au Régiment de Béarn & Seigneur D’ORCEVAL
– Louis né le 2 juillet 1742.
L’ordre de déportation au Canada prit fin en 1739, mais Jacques demeura toujours à Québec où il semblait se plaire…
Le Fichier Origine nous apprend qu’après le décès de Jacques survenu le 17 novembre 1743, sa femme et ses enfants partent pour la France, un pays où ces derniers n’ont jamais mis les pieds…